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Equity : un outil puissant… mais pas sans règles. Ce que chaque entrepreneur doit savoir avant d’accepter un investisseur

5 décembre 2025 par
Prospérin Tsialonina
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Dans l’imaginaire collectif, lever des fonds est souvent perçu comme un signe de réussite.

Pour beaucoup d’entrepreneurs, obtenir un financement en equity représente le moment où “tout devient possible”.

Et pourtant, derrière l’argent, il y a une vérité essentielle que peu osent dire :

L’equity n’est pas qu’un financement. C’est une relation. Et une relation, ça peut booster… ou détruire une entreprise.

Dans cet article, je partage une conviction forgée en plus de 20 ans d’accompagnement d’entrepreneurs de toutes nationalités à Madagascar, en Afrique et en Europe :

L’equity peut changer une vie, mais il ne faut jamais oublier que ce qui fait une entreprise, c’est l’entrepreneur.

1️⃣ L’equity, c’est plus que de l’argent : c’est un engagement

Quand un investisseur prend des parts dans une entreprise, il ne donne pas seulement du capital.

Il apporte aussi :

  • du réseau,
  • une vision,
  • de l'expertise sectorielle,
  • parfois même une discipline de travail,
  • et surtout : un engagement dans la durée.

Un entrepreneur que j’ai accompagné me disait un jour :

“Je ne cherchais pas l’argent. Je cherchais quelqu’un qui croit en moi autant que moi.”

C’est ça, la force d’un bon fonds : il s’implique, il challenge, il ouvre des portes.

Mais cette force peut avoir un revers.

2️⃣ Ce qui fait une entreprise… ce n’est pas l’investisseur. C’est l’entrepreneur

On peut conseiller un entrepreneur, l’aider à structurer ses idées, lui montrer d’autres chemins possibles. On peut l’accompagner à prendre du recul, clarifier ses priorités ou renforcer sa stratégie. Mais à la fin, la seule personne qui doit décider, c’est lui. Parce que c’est lui qui porte l’histoire de l’entreprise, qui sent le terrain, qui affronte la réalité chaque matin. C’est lui qui prend les risques et qui vit, seul, les conséquences des choix faits aujourd’hui pour l’avenir.

Un investisseur, aussi bienveillant soit-il, ne voit jamais qu’une partie du tableau : un portefeuille, une logique financière, une trajectoire globale. Le fondateur, lui, voit son entreprise. Son nom. Sa sueur. Ses nuits blanches. Ce n’est pas la même logique, et ce n’est certainement pas la même responsabilité. C’est pour cela que dans toute décision stratégique, le dernier mot doit revenir à celui qui tient le gouvernail.

3️⃣ Là où tout dérape : quand le fonds veut contrôler plus que nécessaire

C’est là que se trouve le piège le plus fréquent. Beaucoup de fonds arrivent avec des conditions qui semblent logiques au premier abord : un tiers bloquant “pour protéger l’investissement”, un droit de veto sur les décisions stratégiques “pour garantir la cohérence”, ou encore la nécessité d’obtenir leur accord avant chaque dépense importante… puis finalement avant chaque dépense tout court. Sur le papier, cela paraît raisonnable. Dans la vraie vie d’une PME, c’est tout autre chose.

Ces mécanismes, une fois en place, transforment le quotidien du fondateur en parcours administratif permanent. Chaque embauche, chaque stratégie commerciale, chaque ajustement opérationnel devient une négociation. L’entrepreneur passe plus de temps à demander la permission qu’à diriger son entreprise. L’agilité disparaît, l’énergie se disperse, et l’entreprise commence à perdre ce qui faisait sa force : sa vitesse, sa vision, son instinct.

C’est pour cela que je dis souvent : ce type de gouvernance peut littéralement pourrir la vie d’un fondateur. Non pas parce que l’investisseur est “mauvais”, mais parce que la structure qu’il impose n’est pas compatible avec la réalité d’une entreprise en croissance, qui a besoin de décider vite, d’avancer, et parfois… de se tromper pour mieux rebondir.

Un exemple réel (avec nom modifié) :

Cas de Léa — startup dans l’agroalimentaire

Léa lève un fonds auprès d’un investisseur très structuré.

Dans le pacte d’actionnaires, l’investisseur exige un veto sur :

  • le recrutement des cadres,
  • les dépenses au-delà de 2 000 €,
  • la signature de nouveaux contrats,
  • la stratégie commerciale.

Résultat ?

En 18 mois :

  • Léa passe plus de temps à justifier qu’à agir.
  • Les décisions commerciales prennent des semaines au lieu d’un jour.
  • L’équipe perd confiance.
  • L’entreprise manque 2 opportunités de croissance.

L’investisseur voulait protéger son argent.

Mais en réalité, il a bloqué le moteur. Parce que le moteur, c’était elle.

4️⃣ Le tiers bloquant : le point non négociable

Dans une SA ou dans un pacte d’actionnaires, le tiers bloquant permet à un investisseur minoritaire (souvent 33,34%) de bloquer une décision importante.

En théorie, c’est une protection.

En pratique, c’est souvent :

  • un frein,
  • une source de conflit,
  • une perte d’agilité,
  • et parfois… la paralysie totale.

C’est pour cela que je conseille toujours :

Si le fonds exige un tiers bloquant sur les décisions stratégiques, réfléchissez très sérieusement avant d’accepter.

Une entreprise doit pouvoir avancer.

Et avancer, c’est décider vite.

5️⃣ Comment choisir le bon investisseur ? Trois critères simples

1. Le fonds respecte-t-il la vision du fondateur ?

Un investisseur qui impose sa propre vision, ce n’est plus un partenaire.

C’est un patron déguisé.

2. Le fonds aide-t-il vraiment ou complique-t-il tout ?

Un bon fonds apporte de la clarté.

Un mauvais fonds apporte de la confusion.

3. Les décisions peuvent-elles être prises rapidement ?

Les entreprises meurent rarement par manque d’idées.

Elles meurent par lenteur.

6️⃣ L’equity reste un outil extraordinaire… à condition d’être bien utilisé

L’equity permet :

  • d’accélérer,
  • d’ouvrir des marchés,
  • d’apporter une crédibilité immédiate,
  • d’améliorer la gouvernance,
  • d’attirer de meilleurs talents.

Mais l’equity doit rester un levier, pas une prison.

Un entrepreneur doit rester maître du volant.

7️⃣ Le conseil que je donne toujours : ne cherchez pas seulement un investisseur. Cherchez un allié.

L’entrepreneur ne doit pas lever pour lever.

Il doit lever pour grandir, se structurer, se renforcer.

Et pour cela, il a besoin :

  • d’un fonds qui croit en sa vision,
  • qui respecte son rôle,
  • et qui n’essaie pas de piloter l’entreprise à sa place.

Parce que finalement…

Ce qui fait une entreprise, ce n’est jamais l’argent.

C’est toujours l’entrepreneur.

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